Hermann Oberth, Max Valier, Otto Wilhelm Gail et Fritz Von Opel furent les pionniers de la propulsion par moteur-fusée en allemagne. A l’été 1928, Max Valier et Fritz Von Opel construisirent une automobile à fusées, qu’ils expérimentèrent sur la piste d’essais des usines Opel à Rüsselsheim. Elle atteignit du premier coup une vitesse de 210 km/h. Opel construisit trois autres voitures d’essai. Lorsque la quatrième explosa, les autorités manifestèrent leur « désapprobation la plus totale », de sorte qu’Opel arrêta les essais.

Max Valier poursuivit seul ses expériences. Ses traîneaux à fusées atteignirent 368 km/h. sur la glace du lac de Starnberg. Fritz Von Opel ne put demeurer inactif. Le 30 septembre 1929, il parcourut plus de deux kilomètres à 15 mètres du sol dans un avion propulsé par fusées. Max Valier félicita son concurrent. Peu après, Valier mourait dans l’explosion, à l’arrêt, d’une de ses voitures d’essai.

Enfin Hermann Oberth obtint une autorisation officielle: une « base berlinoise de lancement de fusées » put s’ouvrir à Reinickendorf, sur laquelle pouvaient être faites des expériences, avec un appui symbolique de l’Etat. A ces expériences participa un jeune homme qui, dès l’école primaire, avait bricolé des fusées fonctionnant avec plus ou moins de succès: Wernher von Braun.

Ce jeune constructeur de fusées fit la connaissance d’Ernst Heinkel en novembre 1935. Von Braun déclara au pionnier déjà reconnu: «L’armée ne s’intéresse pas à mes essais. Le ministère de l’air lui-même ne veut pas en savoir grand chose. Il doute qu’un appareil puisse même être mis en mouvement par un moteur fusée situé à la queue du fuselage, estimant qu’il n’y aurait pas mouvement en avant mais capotage. J’entends prouver le contraire. » Et Wernher Von Braun le prouva !

Ernst Heinkel mit à disposition le fuselage d’un He-112. Le pilote d’essai Ernst Warsitz, de Rechlin, vint se joindre à l’équipe de Von Braun. Le propulseur de Von Braun fut installé dans le fuselage du He-112 de telle manière que le réservoir à oxygène se trouvait juste devant le siège du pilote, et le réservoir à alcool juste derrière.

Le contenu de ces deux réservoirs était mis sous pression et parvenait ainsi dans la chambre de combustion qui se trouvait à la poupe du fuselage. C’est là que les propergols se mélangeaient et formait un jet de gaz brûlant propulsant l’appareil en avant.

L’équipe de Von Braun fixa le fuselage du He-112 dans la terre. La queue était relevée, de manière à ce que la poussée soit dirigée horizontalement. Le système de propulsion fonctionnait aussi longtemps qu’il y avait de l’alcool et de l’oxygène liquide. Il n’y avait aucun moyen d’interrompre la propulsion tant que de l’oxygène et de l’alcool parvenait dans la chambre de combustion.

Alors que jusque-là tous les essais de ce système de propulsion avaient été télécommandés depuis un poste d’observation caché derrière un mur de béton (car plus d’une fois la tuyère avait été arrachée et expédiée dans les airs), Von Braun et Warsitz voulaient maintenant démontrer les progrès accomplis et la sécurité de l’appareil de propulsion au moyen d’un fuselage «habité».

Des leviers avaient donc été fixés au tableau de bord du He-112 pour régler le mélange des carburants et déclencher la combustion. Von Braun et Warsitz se trouvaient placés, durant l’expérience, de chaque côté de la cabine de pilotage ouverte, sur les racines d’aile auxquelles est fixée, sur un avion complet, la voilure.

« Nous autres, observateurs, étions restés derrière le mur de béton. Il sortit de la queue du fuselage un torrent de feu rouge et blanc impressionnant qui devint une flamme d’une dizaine de mètres de long. Même cachés derrière notre mur, nous baissâmes la tête par suite de l’ébranlement de l’air et du bruit. A près de 40 mètres derrière l’avion, de lourdes plaques d’acier de deux mètres carrés qui se trouvaient déposées contre un remblai de sable furent soufflées en l’air et tournoyèrent de tous côtés. Cela ne dura que 30 secondes, puis tout retomba dans le silence ». L’avion n’était pas endommagé. Von Braun et Warsitz, encore qu’un peu émus, se tenaient sur la machine sans avoir été blessé.

Encouragé par les essais aux sols, Heinkel décide de procéder à un essai en vol avec le plus talentueux des pilotes d’essais de Heinkel aux commandes, Warsitz. Cet essai failli se finir en un dramatique accident. L’avion s’écrasa et le pilote s’en sortit heureusement sans une égratignure. Heinkel décide alors de continuer les recherches sur les avion-fusées avec le He-176.

Cet avion-fusée, le premier de son espèce et lointain ancêtre du X-15, fît son premier vol dès le 20 juin 1939, dans le plus grand secret. Premier appareil à réaction capable de voler de toute l’histoire de l’aviation, le He-176 était propulsé par un moteur-fusée Walter HWK RI-203, fournissant tout juste 690 kg de poussée, ce qui lui permit pourtant d’atteindre une vitesse de 750 km/h. « Ce ne sont pas des ailes », se moqua Ernst Udet lorsqu’il vit pour la première fois l’appareil « mais tout au plus des marchepieds ».

Pourtant, il ne pouvait pas ignorer que Lippisch travaillait depuis longtemps à des ailes volantes et à des avions à voilure en delta. Mais l’as de l’aviation de la Grande Guerre et des années 1920 en restait à l’idéal des moteurs à pistons pétaradants et des ailes de type classique. Le projet He-176 tomba bientôt dans l’oubli éclipsé par le premier avion à turboréacteur du monde, le He-178.

Sources :

Néant